Cet absolu de la personne

 

 

« Qui a la grâce, c’est peut-être celui qui s’est accepté depuis toujours, qui n’a pas une seule fois cherché à sortir de soi, ou s’ajouter quoi que ce soit. Cet absolu de la personne donne un pouvoir irrésistible. » André Fraigneau, Papiers oubliés dans l’habit, carnets 1922-1949, éd. du Rocher, 2001. Point de départ possible pour un article à faire sur la notion de grâce chez Roger Vailland… En attendant, voilà la citation.

Mimétiques du désir


Cinquante ans tout juste après la parution de son premier livre, Mensonge romantique et vérité romanesque, paraît sous la signature de René Girard un recueil de sept textes intitulé Géométries du désir (aux éditions de l’Herne), dont la diffusion initiale s’étale sur tout ce demi-siècle, de 1953 à 2007, et les auteurs traités sur quelque huit cent ans, de Chrétien de Troyes au « nouveau roman » des années 1960. Une sorte de grand écart donc, par lequel le théoricien du désir mimétique applique cette grille de lecture à un corpus qui apparaît comme représentatif de la littérature européenne – puisqu’il inclut Dante et  Shakespeare – à l’exception notoire, toutefois, du 19e siècle.

« Chez Chrétien de Troyes, Dante, Racine ou Marivaux, le jeu de l’amour ne doit rien au hasard mais obéit à des lois implacables qui s’éclairent à la lumière de l’hypothèse mimétique. Dans les essais réunis ici pour la première fois en France, René Girard montre que les plus grands écrivains sont des géomètres du désir. L’éternel triangle amoureux n’est d’ailleurs que la figure mimétique la plus évidente. », écrit Mark Anspach dans son introduction. « Plus qu’un simple recueil de textes, il représente une tentative de décrire la même histoire sur une échelle plus vaste, de l’amour courtois du roman médiéval jusqu’à l’érotisme voyeuriste du roman contemporain. »

Une tentative qui peut sembler démesurée, mais il ne s’agit pas d’être exhaustif, simplement d’éclairer par quelques exemples probants la mise en œuvre de cette théorie globale, selon laquelle les personnages créés par les grands auteurs évoluent dans une mécanique de rapports qui fonctionnent selon des lois universelles : « Seuls les grands écrivains réussissent la peinture de ces mécanismes sans la fausser au bénéfice de leur Moi : on tient là un système de rapports qui, paradoxalement ou plutôt pas paradoxalement du tout, varie d’autant moins que les écrivains sont plus grands ». Les positions (individuelles, historiques, sociales…) et les places occupées par les personnages induisent les types de relations qu’ils pourront avoir entre eux. Pour chacun des auteurs examinés, Girard pointe également le sens que les rapports décrits prennent dans notre univers contemporain.

Ainsi, il voit Chrétien de Troyes comme « un satiriste qui démonte la logique des ambitions dévorantes de l’aristocratie féodale de son temps ». Dans cet univers, le désir des femmes passe par l’admiration vouée au chevalier : « les femmes tombent toujours amoureuses du vainqueur ». Mais ce constat peut être extrapolé : « Dans notre univers culturel comme dans bien d’autres, la compétition est l’âme du sexe, non la libido freudienne ». Considérant, dans la Divine Comédie, l’épisode de Paolo et Francesca, Girard souligne que le succès de cette histoire, au début du 19e siècle, comme triomphe de la passion repose sur une méprise. Dans le poème de Dante, l’enfer est une réalité et l’entreprise amoureuse de Paolo et Francesca un échec. Le roman de Lancelot qu’ils lisent, troisième personnage de l’histoire, joue le rôle de l’entremetteur diabolique.

La scène du balcon, tableau de Frank Dicksee (1884)

Chez Shakespeare, les couples d’amoureux sont l’incarnation de l’amour vrai déjà imprégné d’un individualisme moderne, mais « l’illusion de l’amour vrai recouvre un désir mimétique » : ils s’imitent les uns les autres et imitent les contes qu’ils ont lus. Dans Roméo et Juliette, le climat de la vendetta familiale affecte le langage de la passion, d’où l’usage d’une rhétorique flamboyante et l’abondance des oxymores (Juliette parlant de Roméo comme d’un « démon angélique »…) qui sont « en adéquation à la situation chaotique du personnage qui les formule ». La loi du désir mimétique est celle de la frustration universelle, son intensité inversement proportionnelle à ses perspectives de satisfaction. Il en résulte un ressentiment à l’égard de la personne aimée, et une combinaison passion/ressentiment que l’oxymore exprime à la perfection. L’amour de Juliette n’est pas seulement amplifié mais approfondi par l’adjonction de la haine. La querelle familiale constitue un élément extérieur introduit par Shakespeare pour aménager la place de la violence dans l’amour.

L’article le plus développé (une soixantaine de pages) est celui sur Racine. Girard y fait une étude détaillée des métaphores : « Domination et servitude, profane et sacré : telles sont les deux polarités essentielles de la rhétorique précieuse ». Ces deux domaines métaphoriques fusionnent pour révéler la « gloire » racinienne : elle est « éclat, lumière éblouissante que reflètent les visages tournés vers l’être glorieux ». Dans ce contexte, quelle peut être la place du désir ? « Tout désir est faiblesse ; c’est pourquoi seul le désir qu’on inspire peut racheter la honte de celui qu’on ressent. » D’ailleurs, le monde de Racine – à l’exception de Bérénice – est aussi celui du désir non réciproque, pour des personnages qui trouvent leur unité « dans la folie, le meurtre ou le suicide ». La place de Phèdre dans l’œuvre de Racine s’avère cruciale, car c’est aussitôt après (1677) que Racine abandonne le théâtre profane et devient historiographe du roi. Il écrira encore deux tragédies bibliques, Esther et Athalie, mais la préface de cette pièce, déjà, « confirme le rôle de Phèdre dans l’évolution spirituelle de son auteur ».

Restant dans le domaine du théâtre, Girard souligne le caractère impitoyable de l’amour-propre chez Marivaux, « l’absence d’authentique tendresse » et l’hypocrisie intervenant pour ses personnages comme « processus de self-deception ou autotromperie » : il s’établit une division du psychisme entre trompeur et trompé. Le marivaudage, loin d’un aimable badinage de cour, constitue une « tentative de révéler, au moment même où il se déploie du point de vue de l’intéressé lui-même, le processus à demi conscient par lequel le sujet s’illusionne ». Girard éclaire ce processus par une comparaison avec Sartre (et sa notion de « mauvaise foi ») : « dans les deux cas, on recourt à l’ambiguïté morale afin d’esquiver un choix difficile ».

On enjambe le 19e siècle pour aborder l’érotisme selon Malraux : il apparaît comme associé à la nécessaire idée d’une contrainte, d’une humiliation « en soi ou chez l’autre, et peut-être chez les deux ». Quoi qu’il en soit, l’érotisme n’est pas une solution, la sexualité est dénoncée comme une servitude. « Malraux évoque la mort en des termes érotiques tandis que la sexualité appelle des images funèbres ». Mais une fraternité serait possible dans la découverte partagée de l’absurdité de l’existence… Malraux, rappelle Girard, n’est pas un romancier réaliste, la fiction dans laquelle il plonge devient un « univers transfiguré par la présence de l’absurde ». Et dans ce monde son héros pratique le masochisme comme une ascèse, souhaitant l’échec « pour pouvoir le transformer en triomphe esthétique ».

La dernière étude, consacrée à quelques auteurs actifs dans les années 1960, m’a semblé nettement moins convaincante. Girard indique d’abord que du 19e au 20e siècles, le passage de l’amour romantique au triomphe de la sexualité n’a fait que renforcer l’individualisme, érigeant la « supériorité du sujet désirant » par rapport à des partenaires interchangeables. Dans ce monde, Don Juan se trouve déplacé. Le Monsieur Jean de Roger Vailland « veut impressionner les belles femmes par sa lubricité ». Différence majeure, « Don Juan cherchait seulement à tromper les autres, Monsieur Jean cherche aussi à se tromper lui-même » (ce qui le rapprocherait des héros de Marivaux). Sa véritable filiation remonterait en fait au dandy du 19e siècle avec son affectation d’indifférence. Mais à mon humble avis, Girard fait fausse route quand il examine La Loi du même Vailland. Si l’exercice de la Loi tel que le décrit Vailland est bien celui de « la dialectique implacable du désir égotiste », je ne crois pas que celui-ci veuille, comme le dit Girard, « nous faire partager son admiration pour le vainqueur ». Vailland analyse un processus et en démonte les racines historiques, sociales, ethnologiques ; et s’il désigne quelqu’un dans ce roman comme admirable, ce serait plutôt le vieux Don Cesare, le désintéressé… L’article s’achève avec quelques lignes sur la Chute de Camus et la Jalousie de Robbe-Grillet (« triangle classique du drame bourgeois ») ; j’avoue que je suis un peu perplexe quand Girard parle de « courant littéraire qui se partage entre séducteurs arrogants et pauvres misérables » : quel courant ? il y a bien peu de choses en commun entre ces livres, à part leur époque de parution. Lorsque le but du héros (en général) est de se soustraire au regard de la femme, de voir sans être vu, il se place en position de voyeur et le lecteur lui-même devient voyeur. Mais « l’érotisme moderne exprime une fascination pour l’identique conçu comme altérité radicale », ce qui ne peut conduire qu’à une impasse.

L’ensemble reste d’un intérêt constant. La théorie de Girard a les défauts de ses qualités : c’est un système, qui permet de donner de nouveaux éclairages à des textes connus. C’est aussi un système, avec tout ce qu’il peut avoir de systématique…

Critique publiée le 20/5/11 chez Babelio

« Cette lumière secrète venue du noir »

Le premier mérite de l’exposition que le Centre Pompidou consacre cet automne (et jusqu’au 8 mars 2010) à la peinture de Pierre Soulages est de rendre évidente la profonde cohérence de son œuvre. Le parcours proposé en dix salles suivant un ordre chronologique montre bien comment les éléments essentiels de son travail – grands formats, abstraction totale, domination de quelques couleurs sombres – étaient là dès ses débuts à la fin des années 40. A travers les soixante années qui ont suivi, ce processus s’épure progressivement et se radicalise jusqu’au règne absolu du noir qui est devenu l’essence même de sa peinture.

Extrait de la présentation : Le Centre Pompidou célèbre, par une grande rétrospective, l’œuvre du plus grand peintre de la scène française actuelle, Pierre Soulages. À la veille de son 90ème anniversaire, Soulages, « peintre du noir et de la lumière », est reconnu comme l’une des figures majeures de l’abstraction. (…) Retraçant plus de 60 ans de peinture, l’exposition de cet automne permet une lecture nouvelle du travail de l’artiste en insistant sur les développements récents de son œuvre.

L’exposition rassemble plus d’une centaine d’œuvres majeures créées de 1946 à aujourd’hui, des étonnants brous de noix des années 1947-1949 aux peintures des dernières années (la plupart inédites) qui manifestent le dynamisme et la diversité d’un travail toujours en devenir.

Il semble que Soulages ait participé activement à la conception de l’exposition et aux choix d’accrochage. En salle 5, point-clef qui éclaire le basculement de son univers pictural, il propose ainsi

un dispositif qui permet de basculer dans un autre univers pictural : une salle entièrement noire (murs, sol, faux plafond) à l’exception d’un mur peint en blanc et violemment éclairé. Face à celui-ci, trois peintures noires (appartenant à une suite de sept réalisées du 28 décembre 1990 au 19 février 1991) réfléchissent la lumière. Les œuvres se détachent du mur grâce à un système de potences qui vise à ‘donner aux tableaux leur existence de choses’. Il s’agit, par ce dispositif, de convier le visiteur à changer de regard pour aborder cette ‘peinture autre’ survenue en janvier 1979, en rupture, selon l’artiste, ‘avec la conception classique de ka peinture où le reflet est considéré comme parasitant la vision’. (…) Pour cette peinture sans précédent, Soulages a créé un néologisme : outrenoir. ‘Outrenoir pour dire : au-delà du noir une lumière reflétée, transmutée par le noir. Outrenoir : noir qui cessant de l’être devient émetteur de clarté, de lumière secrète. Outrenoir : un autre champ mental que celui du simple noir.’

Et c’est ainsi que l’on découvre, à mesure que l’on progresse à travers cette œuvre exigeante et austère, des richesses insoupçonnées. Le spectateur est convié à participer à ce ‘triple rapport’ qui s’établit avec l’œuvre-objet et avec le peintre. Ce n’est pas un effort particulier qui lui est demandé mais une sorte de mise en disponibilité lui permettant de percevoir cette ‘lumière secrète’ émise par le noir.

Soulages par Dumas500

Pierre Soulages, photo de Richard Dumas

Roger Vailland (oui, je sais, encore lui) a été un grand ami de Soulages qu’il avait rencontré en 1949. Il lui a consacré un livre, Comment travaille Pierre Soulages (réédité par le Temps des Cerises en 1998), ainsi que plusieurs articles.

Il convient d’être reconnaissant à Soulages d’avoir été le premier parmi les peintres de grand talent, à ne jamais raconter ni décrire. Aucune ambiguïté à aucun moment de son œuvre. Il n’a jamais évoqué la nécessité d’exprimer ses « états d’âme » pour justifier son goût d’étaler des couleurs sur une toile. Il n’a jamais évoqué les expériences des mystiques et les métaphysiques qu’elles impliquent, pour expliquer la concentration nécessaire à son travail. Il ne s’est jamais dérobé derrière des philosophies idéalistes. Il accomplit ses parcours dans un style d’une qualité chaque année plus élevée, et qui atteint parfois au « sublime ». Roger Vailland, « Procès à Soulages », Clarté n°43, mai 1962

J’ai choisi pour illustrer cette note un portrait photographique de l’artiste, trouvant que les reproductions des œuvres sont largement impuissantes à rendre compte de leur intensité et de leur spécificité. Celui-ci provient du site « pierre-soulages.com » qui est très riche de ressources. On peut consulter aussi le dossier du Centre Pompidou.

Horizons de l’Aubrac

« Au centre de la France, sur les confins des départements de la Lozère, du Cantal et de l’Aveyron, tout près du faîte où se partagent les eaux, celles qui descendent vers l’Océan et celles qui descendent vers la Méditerranée, s’étend un vaste plateau, fait d’une seule coulée de lave, qui s’est muée, en refroidissant, en toutes sortes de roches et de cristaux : le porphyre antique qui est rose et rouge, comme les joues d’une bergère, l’olivine qui est du même vert placide que les gouffres placides où reposent les torrents, la magnétite qui affole les boussoles, l’uranium qui est louche, comme les régimes en décomposition à la veille des révolutions, le basalte solennel et pesant comme une exécution capitale, sur une place publique, devant le peuple assemblé, les tambours battant à la mort, et l’obsidienne, mate comme les ténèbres, avec des lueurs soudaines, des traînées de lumière comme la vague maîtresse, le pan d’océan que révèlent au milieu de la tempête les fanaux du paquebot. C’est le plateau de l’Aubrac, où Lamballe possède un domaine, qu’il aime, et qu’il perdra un jour, sans verser une larme. »

C’est ainsi que Roger Vailland décrit, à la fin de son roman Bon pied bon œil, la région où je viens de passer une trop brève semaine. Je savais juste qu’il parlait de l’Aubrac dans ce livre, je ne me souvenais pas précisément de ce passage, que je viens de retrouver ; il allie le descriptif géologiquement précis à une certaine solennité que Vailland affectionne quand il parle de choses qui lui tiennent à cœur ; et puis il y a les ruptures de rythme qu’il manie si bien : une longue période lyrique, suivie d’une phrase brève et sèche.

P1030586-copie

Mais l’essentiel n’est pas de nature littéraire, il est dans la rencontre avec un lieu, un paysage et un terroir, comme on le dit si facilement. J’étais déjà passée par le Massif central, bien sûr, et même dans certains coins du Rouergue, mais cette fois j’avais envie de me concentrer sur une région d’étendue relativement limitée, et c’est ainsi que j’ai exploré essentiellement le nord de l’Aveyron et le Cantal, avec juste une incursion vers le Puy-de-Dôme pour y voir quelques églises romanes.

P1030614-copie

J’ai fait des « kilomètres de chien » sur des routes petites, voire minuscules, et sinueuses comme des chapelets de saucisses enroulées. Et je pensais de temps en temps au fait que la France est aujourd’hui habitée essentiellement par une population urbaine (77 % aujourd’hui, selon l’INSEE, contre 53 % en 1936), laissant les campagnes désertées. J’ai regardé tous ces chiffres en rentrant et vu que l’Aveyron et le Cantal ont des densités de population de l’ordre de 30 habitants au km2, soit un tiers de la moyenne française. Les villages que j’ai traversés étaient vivants, ne manquaient pas de commerces, mais c’était peut-être un effet d’été, il faudrait revenir au cœur de l’hiver. En dehors des villages (rares et éloignés), fort peu de maisons isolées, quelques burons, souvent abandonnés. Je ne croisais que bien peu de véhicules, bien plus souvent des troupeaux de vaches, qui considéraient la route comme une extension naturelle de leur espace : patience recommandée. Et parfois j’entendais leurs clochettes avant même de les voir, en contrebas de la route ou en contrehaut, si cela peut se dire (et pourquoi pas ?)

Vache_Aubrac

Car l’Aubrac, qui tire son nom, paraît-il, de « Alto Braco » qui veut dire « lieu élevé », constitue également un lieu d’estive pour les troupeaux venant des fermes du Cantal et de l’Aveyron. L’Aubrac n’est pas seulement un territoire, c’est aussi le nom d’une race de vache, adaptée au climat rigoureux de ces hauts plateaux. Et elles sont incroyablement belles, les vaches de l’Aubrac, avec leurs cornes droites et fines, leur poil couleur de café-crème et leurs yeux comme fardés de khôl. (Le héros de Vailland cité plus haut, Lamballe, s’est établi comme éleveur de « taureaux de l’Aubrac » – machisme oblige. « Et tes vaches ? lui demande un ami. – Ce sont les plus belles de l’Aubrac, » répond Lamballe. « Il faudra que tu viennes voir mon troupeau… Les vaches de l’Aubrac, sais-tu, elles ont les yeux fendus en amande et les paupières noires des putains orientales. »)

Ce que j’ai tellement aimé dans ce pays, c’est la manière dont s’y déploient les paysages, on monte en tournant encore et encore, on débouche sur un haut plateau, et à perte de vue s’étendent des lignes de collines, ponctuées de quelques arbres, doucement arrondies comme des corps alanguis, dans ce pays que l’on devine âpre et sévère. Faute de pouvoir mieux décrire, je m’appuierai sur Julien Gracq :

« Rarement je pense au Cézallier, à l’Aubrac, sans que s’ébauche en moi un mouvement très singulier qui donne corps à mon souvenir : sur ces hauts plateaux déployés où la pesanteur semble se réduire comme sur une mer de la lune, un vertige horizontal se déclenche en moi qui, comme l’autre à tomber, m’incite à y courir, à perte de vue, à perdre haleine. » (Carnets du Grand Chemin, José Corti, 1992).

Vastes horizons et ciels immenses qui suscitent une exaltation sereine, si toutefois cet oxymore a un sens. Revenue dans la ville, je me dis que je n’ai pas passé assez longtemps à contempler, tout simplement, cette beauté simple et éternelle. Ce sera un prétexte pour y retourner.

P1030708-copie

(toutes les photos sont de mon cru sauf la vache qui vient de Wikipedia…)