Cependant, un Lapin des plus agités
sort par les derrières du terrier
et va avertir un berger voisin,
qui aimait à prendre dans un lacs
de ces Lapins nourris de genièvre.
Fénelon, Le Chat et les Lapins
Ni palindrome ne mord, ni lapin
Patrice Besnard
On vient de commencer l’année du lapin, selon le calendrier chinois. Mais ce sympathique animal est présent aussi dans d’autres calendriers et il y est fréquemment associé à la Lune. Cela vient de ce qu’on a cru reconnaître sur l’astre nocturne l’image d’un lapin. L’histoire d’un lapin vivant sur la Lune existe dans de nombreuses cultures, notamment dans le folklore de l’Asie de l’Est, où il utilise un mortier et un pilon. Dans la mythologie chinoise, c’est afin de préparer de l’élixir de longue vie pour la déesse de la lune, mais dans les versions japonaise et coréenne, c’est simplement pour faire un gâteau de riz (mochi au Japon).
Le lapin lunaire joue également un rôle important dans le calendrier aztèque. Rappelons que les Aztèques avaient plusieurs calendriers : d’abord un calendrier sacré (Tonalpohualli) basé sur la combinaison d’une série de nombres de 1 à 13 et d’une autre de vingt glyphes, soit 260 combinaisons possibles. L’année rituelle comptait donc 260 jours. Chaque glyphe se traduisait par un mot rattachant le jour à un dieu et possédait un aspect divinatoire.
Pour la datation ordinaire, on utilisait un calendrier solaire de 365 jours (Xiuhpohualli). L’année était divisée en 18 mois de 20 jours, ce qui le reliait à la roue des glyphes du calendrier sacré. A la fin du dernier mois, pour compléter la durée de l’année solaire, on ajoutait cinq ou six jours (les nemontemi) considérés comme particulièrement néfastes.
L’année portait le nom du dernier jour du dernier mois (le dernier jour ordinaire avant les nemontemi). Seuls 4 glyphes pouvaient tomber à ce moment : acatl (roseau), tecpatl (silex), calli (maison) et tochtli (lapin) – nous y voilà. L’année 1-roseau était donc suivie de 2-silex, etc. Toutes les combinaisons étaient épuisées en 52 ans (4×13), ce qui constituait un « siècle » aztèque, dont la première année était toujours une année 1-roseau. Les quatre glyphes annuels étaient associés aux points cardinaux, le tochtli correspondant au Sud.
Notre lapin était également associé à la déesse Mayahuel, déesse de la fertilité dont l’emblème est l’agave (avec lequel on fabrique le pulque). Épouse de Patecatl, le dieu de la médecine, elle est aussi la mère des quatre cents Centzontotochtin, dieux-lapins de l’ivresse.
LEGENDE DE TOCHTLI, LE LAPIN DE LA LUNE
Quetzalcóatl, le dieu grand et bon, partit un jour en voyage sur la terre sous la forme humaine. Comme il avait marché toute une journée, à la fin de l’après-midi il se sentit fatigué et affamé. Mais il continua à marcher, jusqu’à ce que les étoiles commencent à briller et la lune à se pencher à la fenêtre du ciel. Alors il s’assit au bord du chemin, et comme il était là à se reposer, il vit un petit lapin qui était sorti pour dîner.
– Qu’est-ce que tu manges ? lui demanda-t-il.
– Je mange de l’herbe. Tu en veux un peu ?
– Merci, mais je ne mange pas d’herbe.
– Que vas-tu faire alors ?
– Mourir peut-être de faim et de soif…
Alors le lapin s’approcha de Quetzalcóatl et lui dit :
– Ecoute, je ne suis qu’un petit lapin, mais si tu as faim, mange-moi…
Alors le dieu caressa le petit lapin et lui dit :
– Tu n’es qu’un petit lapin, mais tout le monde, désormais, se souviendra de toi.
Et il le souleva, le porta haut, très haut, jusqu’à la lune, où la silhouette du lapin resta imprimée. Puis il le reposa sur la terre et lui dit :
– Maintenant tu as ton portrait de lumière, pour tous les hommes et pour tous les temps.
A voir : plein d’images de lapins dans la peinture dans la Boite à Images de Monsieur K.