Bob Dylan, les origines d’une légende

« En ce temps-là, j’étais en mon adolescence/ J’avais à peine seize ans et je ne me souvenais déjà plus de mon enfance. » (Cendrars, Prose du Transsibérien) En ces temps reculés, Bob Dylan nous est apparu, à nous lycéen(ne)s provinciaux/ales comme une étoile lointaine à notre horizon limité. Mai 68 n’était pas encore passé par là et la capacité de subversion des protest songs de Dylan et de Joan Baez nous donnait des ailes… Tout ça pour dire que l’exposition de la Cité de la Musique à la Villette « Bob Dylan – L’explosion rock 61-66 », ça me parle. Comme d’ailleurs à pas mal de dinosaures de mon espèce que j’y ai croisés, certains solitaires, d’autres flanqués de leurs (grands) enfants à qui ils expliquaient les arcanes de la période.

 

L’exposition est modeste en termes d’étendue : une longue galerie présentant soixante photos en noir et blanc, toutes réalisées en 1964-65 par Daniel Kramer, ouvre sur quatre salles montrant les débuts de Bob Dylan, ses influences musicales (Elvis Presley, Buddy Holly, mais surtout Woody Guthrie),  son arrivée et sa vie à New York, le Newport Folk Festival et l’éclosion du « folk rock », le succès de Like a Rolling Stone… Affiches, photos, guitares et autres banjos, microsillons, etc.

La seconde partie (dans l’espace en sous-sol) est consacrée à la découverte réciproque de Bob Dylan et de la France au début des années 60. J’avais plus ou moins oublié comment Hugues Aufray (mais aussi Johnny Hallyday…) avait adapté de nombreuses chansons de Dylan en français. Il est vrai que, mes copines et moi, on était des puristes : c’était la VO ou rien, et on méprisait cordialement les yéyés. Une projection sur grand écran d’extraits du documentaire de Don Alan Pennebaker Don’t Look Back clôt le parcours. Rapide mais efficace, c’est une plongée dans un autre univers. C’est curieux d’ailleurs comme le fait que la plupart des images (photos ou films) soient en noir et blanc les fait reculer dans le temps, comme si ces scènes étaient plus près des années 30 ou 40 que des décennies qui ont suivi…

 

Photos ©Daniel Kramer, provenant du site de la Cité de la Musique

Musicalité de Paul Klee

Il y a de la musique dans le soupir du roseau ;
il y a de la musique dans le bouillonnement du ruisseau ;
il y a de la musique en toutes choses,
si les hommes pouvaient l’entendre.
Lord Byron


Avec Paul Klee Polyphonies, la Cité de la Musique (à la Villette, jusqu’au 15 janvier 2012) présente sa première exposition monographique consacrée à l’œuvre d’un peintre. J’ignorais pour ma part (mais il y a tant de choses que j’ignore) que Klee fût à ce point lié à la musique, la pratiquant toute sa vie comme violoniste de niveau professionnel et en faisant une voie d’exploration des possibilités expressives de la peinture.

Extrait de la présentation : « Ainsi que le relevaient déjà ses contemporains, la musique traverse l’œuvre de Paul Klee à plus d’un titre. Elle se présente comme l’un des modèles possibles pour la peinture, aux côtés de la poésie et des arts de la scène. Né dans une famille de musiciens, Klee se forme dès la première heure à la pratique du violon et l’entretient sa vie durant. Seul, en duo avec son épouse la pianiste Lily Stumpf ou en quatuor, il interprète de préférence les compositeurs de son panthéon privé : Bach, Mozart, Beethoven, Brahms. Une culture musicale exigeante ressort de ses écrits, touchant à la musique instrumentale autant qu’à l’opéra, au répertoire comme aux compositeurs contemporains qui, de Schönberg à Stravinski, de Bartók à Hindemith, font l’histoire de la modernité. De sa prédilection pour l’«Âge d’or » que représentent à ses yeux l’art polyphonique de Bach et l’opéra de Mozart, Paul Klee a tiré un idéal esthétique. Celui-ci forme l’aiguillon d’une recherche incessante, dans la forme, le style, la technique et le sujet de la peinture. Toute la singularité de l’œuvre se révèle dès lors dans la pluralité et l’étendue de ses registres, où figuration et abstraction trouvent une égale légitimité. Inspirée par l’idée de polyphonie, elle aspire à une totalité travaillée, construite, à la fois multiple et organisée. »

L’exposition, qui suit un parcours chronologique, s’avère particulièrement intéressante en ce qui concerne les années de formation de Klee (grosso modo, jusqu’à la veille de la 1e guerre mondiale) et les étapes qui l’ont amené à faire le choix de la peinture comme son activité essentielle, et à partir de la gravure et du dessin, à aborder la couleur en tant que construction polyphonique qui rejoint la musique. Il n’est pas toujours aisé de comprendre cette démarche qui passe par une connaissance approfondie des langages musicaux. Je ne prétendrai donc pas maîtriser complètement le matériau qui nous est proposé par la Cité de la Musique, simplement en tirer des voies un peu différentes pour regarder une peinture dont la richesse ne s’épuise pas.

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Paul Klee : Burg 1, 1923

J’ai toujours été fascinée par ce qu’il convient d’appeler la « convergence des arts » et par les artistes qui avaient la capacité de s’exprimer avec la même aisance dans plusieurs voies. A commencer par une amie de jeunesse formidablement douée pour l’écriture – elle est devenue par la suite un auteur connu de science-fiction – mais aussi pour le dessin ; j’ai rencontré par la suite une femme peintre (comment dire autrement ?) qui m’a raconté avoir hésité entre l’expression picturale et la poésie. Il me semble qu’il y a là une complétude de l’être humain qui ne peut être autrement atteinte.

Paul Klee : EIDOLA : weiland Pianist, 1940

Henri Michaux, lui-même peintre en même temps qu’écrivain, a écrit au sujet du travail de Paul Klee un texte magnifique, L’Aventure des lignes, qui commence ainsi : « Quand je vis la première exposition de tableaux de Paul Klee, j’en revins, je m’en souviens, voûté d’un grand silence. (…) J’accédais au musical, au véritable silence. Grâce aux mouvantes, menues modulations de ses couleurs, qui ne semblaient pas non plus posées mais exhalées au bon endroit, ou naturellement enracinées comme mousses ou moisissures rares, ses ‘natures tranquilles’, aux tons fins de vieilles choses, paraissaient mûries, avoir de l’âge et une lente vie organique, être venues au monde par graduelles émanations. »

Klee, das Licht und die Schaerfen

On peut trouver beaucoup d’éléments d’informations au sujet de Paul Klee sur le site du Zentrum Paul Klee qui se trouve à Berne, notamment au sujet du rôle de la musique dans sa vie.

Images de cette note provenant du site de la Cité de la Musique.

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PS du 19 décembre – Sur cette expo, allez voir les belles notes, et les belles photos, de Dominique Hasselmann ; avec les textes de René Crevel sur Klee.


Miles Davis, l’incomparable


We want Miles, c’est le titre donné à l’exposition que la Cité de la Musique (à la Villette) consacre présentement (et jusqu’au 17 janvier 2010). We want Miles, c’était le titre d’un de ses albums, sorti en 1982. Magnifique évocation et qui vient pour moi à point, alors que j’avais regretté, en visitant Le Siècle du Jazz au musée du quai Branly en juin dernier, que Miles Davis n’y fût pas mieux honoré.

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En 1991 au North Sea Jazz Festival - photo Peter Buitelaar - image Wikipedia

Je n’y connais rien en musique, j’ai oublié le peu de solfège appris à l’école, je ne sais jouer d’aucun instrument (un regret que j’aurai toujours). Tout ce que je sais, c’est que la musique de Miles Davis est unique, incomparable au sens littéral de cet adjectif. Le son de Miles Davis. Cette année 2009 marque le cinquantenaire de la sortie d’un des meilleurs albums de jazz qui soient, Kind of Blue.

Miles Davis, en plus, ça fait du bien à l’âme. Le regretté auteur hollandais de polars Janwillem van de Wetering donnait dans un de ses livres, je ne sais plus lequel, quelques conseils pour essayer d’aller mieux, ou moins mal, parmi lesquels « écouter davantage de Miles Davis ».

Martin Committee

Trompette Martin Committee - comme l'une de celles de MD qu'on peut voir à la Cité de la Musique

J’ai eu la chance d’assister à un concert de l’homme à la trompette, en novembre 1989 au Zénith, merde il y a déjà vingt ans de ça. Moments inoubliables. Allez donc à la Villette le voir et l’entendre.