Les hasards des errances sur la Toile m’ont fait tomber sur des images de l’église Saint-Germain, dans le village de la Ferté-Loupière, dans l’Yonne – en Puisaye pour être précise. Celle-ci abrite une des huit danses macabres recensées en France (selon Wikipedia), qui se développe sur 25 mètres de long et met en scène 42 personnages.
« Elle est précédée d’un Dict des Trois Morts et des Trois Vifs. Cette représentation murale montre trois jeunes gentilshommes interpellés dans un cimetière par trois morts qui leur rappellent la brièveté de la vie et l’importance du salut de leur âme. Sous cet ensemble, qui occupe tout le mur Nord, ont été représentés un saint Michel terrassant le Dragon et une Vierge de l’Annonciation. Les quatre peintures remontent à la fin du 15e siècle et au 16e siècle. »
J’avais visité cet endroit il y a fort longtemps, mais j’en ai gardé un souvenir très vif. Les fresques en question sont d’autant plus impressionnantes que l’église elle-même est très simple. Et puis le sujet m’intéresse beaucoup. Voici ce que j’écrivais il y a quelques années dans un article consacré aux représentations de la mort dans le Mexique contemporain :
« Le thème de la proximité de la mort a été à la fois largement répandu et d’une remarquable persistance en Europe sur l’espace d’au moins trois siècles. Curieusement, c’est en Espagne que l’on trouve le moins de danses macabres (picturales), alors qu’elles sont beaucoup plus fréquentes en France et dans les pays germaniques. D’ailleurs, le livre d’Hélène et Bertrand Utzinger (Itinéraire des danses macabres, éd. J.M. Garnier, 1996) qui recense toutes les danses macabres connues en Europe – plusieurs dizaines – n’en mentionne qu’une seule en Espagne, celle du château de Javier près de Pampelune. « Cette invasion macabre s’est prolongée en France pendant la première moitié du 16e siècle et plus longtemps encore dans les pays germaniques, alors que l’Europe est entrée dans la période de la Renaissance. Elle a touché presque toute la chrétienté occidentale et a même rejoint au Mexique et au Brésil le sens de la mort qu’avaient les Indiens », précise André Corvisier(Les danses macabres, PUF, 1998, p. 58). A la fin du 16e siècle, dans les pays latino-américains, « l’existence simultanée du courant mystique et de l’influence franciscaine amène alors un développement dramatique des thèmes macabres, une prolifération et une diversification des œuvres qui conduisent à une banalisation du macabre ». Cette banalisation qui nous frappe aujourd’hui au Mexique a donc été aussi, en d’autres temps, le lot des pays du Vieux continent… Par la suite, la présence des symboles de la mort s’y est maintenue dans les œuvres picturales dénommées ‘Vanités’ où le crâne, entre autres, côtoyait fréquemment les artefacts destinés à évoquer beauté, richesse et autres valeurs passagères. Mais progressivement, à partir du 17e siècle, ce symbolisme s’est fait plus discret. »
La question du memento mori a donc pris diverses formes au cours des siècles, notamment celle des peintures de vanités ». De nos jours on a soin de l’occulter, mais elle nous rattrape au tournant…
La mort est le grand sujet permanent et ce le sera toujours. Bel article, merci.
Merci Ariaga, j’apprécie !