« Hector : C’est beau, la Grèce ? (…)
Hélène : C’est beaucoup de rois et de chèvres
éparpillés sur du marbre.
Hector : Si les rois sont dorés et les chèvres angora,
cela ne doit pas être mal au soleil levant. »
Jean Giraudoux,
La Guerre de Troie n’aura pas lieu
Je viens de passer deux semaines en Grèce.
Je connais bien ce pays et je le retrouve toujours avec plaisir. Cette fois pourtant, c’était un peu différent. Je me sentais souvent mal à l’aise devant les problèmes quotidiens que rencontrent les Grecs en raison de la crise. Problèmes de survie tout simplement… comment subsister, comment élever ses enfants, comment se soigner, quand les prix de toutes choses augmentent (ils sont souvent les mêmes, voire plus élevés qu’en France, alors que les revenus sont bien plus faibles), que les impôts sont multipliés et que les salaires ou retraites diminuent. Quand on a la chance d’avoir un emploi, et j’ai entendu un chiffre effarant : plus de 40 % de chômage dans la tranche des 16-24 ans. Dont une bonne partie de jeunes éduqués et diplômés, mais qui ne trouvent pas de premier emploi. Les diktats de la « troïka », les mesures injustes et souvent incohérentes brandies par le gouvernement pour tenter bien tardivement de s’y conformer… Une fois de plus, on pressure de manière révoltante la classe moyenne et surtout les salariés, au lieu d’aller prendre l’argent où il est vraiment : grandes fortunes (dont celle de l’Eglise orthodoxe, riche d’immenses propriétés foncières), grandes entreprises, professions libérales. Le nombre de commerces que l’on voit fermés au hasard des rues est énorme. Les gens s’en sortent tant bien que mal, souvent en exerçant des petits boulots non déclarés (mais comment leur jeter la pierre ?), et la solidarité familiale, toujours très forte dans ce pays, joue à plein.
Alors que moi, malgré des moyens modestes, je peux me permettre de séjourner chez eux pour mon agrément. Bon, je me suis donné bonne conscience en me disant que je faisais marcher le commerce… mentalité de nantie.
Et pourtant, en même temps que ce constat peu amène, il y avait aussi la Grèce de toujours, la Grèce éternelle, la mer, le soleil, le rocher. Les chèvres escaladant les pentes arides des îles, le goût du poisson fraîchement grillé, la nonchalance que l’on entretient, quelque chose qui ressemble à la douceur de vivre.
La douceur de vivre, pour le moment non quantifiable, échappe encore au règne de la marchandise. Elle est notre principale alliée contre l’angoisse du lendemain – à une heure où tenir à jour la liste de nos alliés dans ce combat n’est pas une activité très rassurante.
Oui… et on en arrive à se dire qu’arriver à l’éprouver, cette douceur de vivre (malgré, malgré, malgré…) c’est déjà une chance…
Le monde va mal, la Grèce en particulier. Que d’injustices ! Il faut taxer les riches sans oublier les armateurs !
Merci pour ton témoignage.
Merci, Elisabeth, pour ce témoignage pris sur le vif de la sensibilité…
La Grèce éternelle, oui…
Et comme je suis pleinement d’accord avec ce que dit là Tororo !