La fille de l’araignée

La sculptrice Louise Bourgeois est morte à New York le 31 mai. Afin de lui rendre hommage, je reprends ci-dessous la note que j’avais rédigée à l’occasion de l’exposition qui lui avait été consacrée au Centre Pompidou en 2008. (Note parue à l’époque dans mon ancien blog, Sablier).

Sur l’affiche, on voit une vieille dame, une très vieille dame – elle a quatre-vingt seize ans et demi –, les bras croisés, les yeux baissés. Elle porte un béret ; j’ai l’impression que c’est un clin d’œil de la part de celle qui, née française en 1911, vit aux USA depuis 1938. Cet humour, c’est aussi la marque de fabrique de Louise Bourgeois, grand sculpteur, grande artiste à qui le centre Pompidou consacre actuellement (et jusqu’au 2 juin) une belle exposition.

Cell (Eyes and Mirrors), 1989 - Tate Gallery

Car en même temps qu’elle nous interpelle – et avec quelle vigueur – sur des sujets qui dérangent, Madame Louise Bourgeois, visiblement, ne se prend pas au sérieux : c’est tout aussi admirable, à mes yeux, que la qualité de son travail. Deux cents œuvres (peintures, sculptures, dessins et gravures) sont présentées à Beaubourg, couvrant soixante-dix ans d’activité. « La richesse et la diversité de son œuvre résultent de sa position singulière, toujours décalée : entre deux mondes, entre deux langues, entre féminin et masculin, ordre et chaos, organique et géométrie… Sa sculpture, hybride, témoigne de ce va-et-vient entre des pôles opposés, de ce dédoublement. En allant au plus profond de son inconscient, Louise Bourgeois rejoint les mythes universels et les archétypes, donnant une vision à la fois obscène et dionysiaque de la figure maternelle. »

« Dans mon art, je suis l’assassin. Je ressens le supplice de l’assassin, celui qui doit vivre avec sa conscience. Comme artiste, je suis un être puissant. Au quotidien, je suis comme une souris derrière le calorifère », déclare Louise Bourgeois (source : Cybermuse).

La présentation thématique de l’expo renforce cette mise en évidence des thèmes récurrents de l’artiste : naissance, maternité, blessure, métaphores du corps toujours présent, présence du corps au monde. La puissance des formes qu’elle crée, leur étrangeté, leur violence parfois, engendrent le malaise, la remise en question. Alors qu’en général, je goûte plus souvent des œuvres artistiques dont la beauté appartient à l’harmonie, je suis toutefois fortement attirée par le travail de Louise Bourgeois. Je suis fascinée. Qu’une femme comme elle représente sa mère sous les traits d’une araignée géante, et surtout que cette représentation ne soit pas complètement négative, mais bien ambiguë comme le sont les choses dans la vie réelle, je trouve cela magnifique.

Un film intitulé Louise Bourgeois : l’araignée, la maîtresse et la mandarine, de Amei Wallach et Marion Cajori, est actuellement visible à Paris (je ne l’ai pas encore vu.)
Et une exposition consacrée à son oeuvre doit s’ouvrir le 5 juin à la fondation Emilio e Annabianca Vedova à Venise.

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