Il y a deux ans, visitant pour la première fois l’île de Skyros en Grèce, j’ai découvert qu’au début du 20e siècle, un poète anglais y avait terminé sa vie : Rupert Brooke. Il n’y avait pas habité ; ce fut le fait d’un de ces hasards étranges que le sort, parfois, semble affectionner.
Cette fois j’ai vu la statue de Brooke qui se trouve à la sortie de la ville, surplombant la mer. Il y est représenté comme un jeune dieu grec, nu et triomphant. Pas si étonnant quand on songe qu’il avait reçu de Yeats le titre de « plus beau jeune homme d’Angleterre » (« the handsomest young man in England »). Ses photos le montrent en effet comme un mélange d’Oscar Wilde et de Hugh Grant…
Voici ce que j’écrivais en septembre 07 (c’était sur mon ancien blog, Sablier, et cette note n’est plus disponible) :
Sur la carte de Skyros que je consultais pour voir les routes praticables, j’ai soudain remarqué la mention « Tombe de R. Brooke ». Je me suis demandé qui cela pouvait être et on m’a dit qu’il s’agissait d’un poète anglais. Dès lors, je n’ai eu de cesse d’aller voir cette tombe.
La moitié Sud de l’île, île qui est resserrée en son milieu comme la taille fine d’une jeune fille grecque, présente un aspect très différent de la moitié nord. Elle est aride, dépourvue d’arbres et la végétation se limite à d’étranges buissons semblables à des bonsaïs naturels. C’est aussi une région où se trouvent des zones militaires. Nous avons roulé assez longtemps entre ces pentes peu amènes, avec néanmoins la vue toujours magnifique sur la mer. Enfin, dans une petite oliveraie qui est soudain apparue en contrebas de la route, j’ai aperçu une tombe isolée entourée d’une grille de fer forgé peinte en vert.
Je ne connaissais rien de Rupert Brooke, poète anglais mort en Grèce en 1915, à l’âge de 28 ans. L’encyclopédie précise qu’il s’y trouvait avec le corps expéditionnaire anglais pendant la 1e Guerre Mondiale et qu’il est mort subitement, non par fait de guerre, mais d’une pneumonie contractée à la suite d’une piqûre de moustique ( !). Je n’en savais rien quand j’ai vu son tombeau, sauf la date de sa mort qui y est évidemment gravée. Une plaque de marbre apposée au pied de la tombe évoque des sentiments assez lyriques d’amour de sa terre natale. Comme Lord Byron cent ans plus tôt, Brooke est venu en Grèce pour y mourir prématurément d’un destin contraire plutôt que de la rencontre avec un insecte pernicieux. Je ne saurais dire à quel point cette tombe solitaire sous l’ombre des oliviers, perdue au milieu de rien, suscitait une tristesse douce et pénétrante. Qui se souvient encore de lui ? Qui se souvient des disparus ? Je retourne souvent au poème de Lamartine (mis en musique par Brassens), « Pensées des morts ».
Toutes sortes d’informations sur Rupert Brooke, ainsi qu’un choix de poèmes, sur le site « Rupert Brooke on Skyros » (en anglais).
(toutes les photos de cette note sont de l’auteur)
Alexander et moi avons souvent évoqué Rupert Brooke au cours des derniers mois.
Je connaissais son nom sans connaître ses poèmes, qu’Alexander connaissait très bien, évidemment.
C’est vrai qu’il était très beau !
Mais plus récemment, « le plus beau jeune homme d’Angleterre », si Yeats était revenu il aurait été d’accord, c’était Alexander.
L’auteur a fait de très bellles photos.